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Comment déposer un recours contre un permis de construire ?

De nombreuses situations peuvent vous conduire à vouloir contester un permis de construire (ou une déclaration préalable de travaux) obtenue par un tiers. 

Du plus petit projet personnel émanant du propriétaire de la parcelle voisine, à la plus grande opération immobilière portée par un institutionnel, il existe un point commun : les projets de construction doivent toujours respecter les règles d’urbanisme et les servitudes d’utilité publique applicables et la collectivité est là pour assurer le contrôle de ces règles. Ces règles existent afin d’assurer la cohérence du projet urbain de la commune ou de l’intercommunalité.

C’est donc à l’occasion de la méconnaissance des règles d’urbanisme par un permis ou une déclaration préalable de travaux qu’il est le plus opportun d’agir.

Tout le monde ne peut pas contester un permis de construire ! Tout dépend d’un certain nombre de paramètres, vous devez y avoir intérêt. Dans le jargon, on parle d’intérêt à agir.

Le code de l’urbanisme encadre assez strictement la possibilité d’une contestation (article L.600-1-2 du code de l’urbanisme). Au fil du temps, le juge administratif a affiné son appréciation de ces règles, en rendant des décisions éclairantes pour préciser qui peut agir, et qui ne peut pas.

Si vous êtes un particulier et que votre bien se situe à proximité du projet litigieux, voici les questions que vous devez vous poser :

  • A quelle distance je me situe du projet qui me porte préjudice ? Suis-je voisin immédiat ou non (c’est-à-dire, ma parcelle est-elle limitrophe de celle du projet) ? Cette situation de voisin immédiat vous place en principe dans une position plus facile pour contester un permis. Si vous êtes voisin immédiat, vous devez seulement faire état d’éléments relatifs à la nature, l’importance ou la localisation du projet de construction.
  • Quelle est la nature, l’ampleur des préjudices que vous allez subir (perte d’ensoleillement, environnement naturel dégradé, nuisances sonores, nuisances olfactives… ?)
  • Est-ce que je suis en mesure de produire un document établissant qu’en ma qualité de requérant, j’occupe régulièrement le bien situé à côté du projet litigieux ? Il peut s’agir de mon contrat de bail, de mon acte de vente (Article R.600-4 du code de l’urbanisme)…

Ces premières questions sont importantes car tout le voisinage d’un projet n’est pas admis à contester l’autorisation d’urbanisme, heureusement. Plus vous êtes loin, plus vous devez apporter la preuve de l’atteinte que vous risquez de subir. Il n’est pas question de permettre les recours abusifs.

« 2. Considérant qu’il résulte de ces dispositions qu’il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager, de préciser l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien ; qu’il appartient au défendeur, s’il entend contester l’intérêt à agir du requérant, d’apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité ; que le juge de l’excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu’il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci ; qu’eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d’un intérêt à agir lorsqu’il fait état devant le juge, qui statue au vu de l’ensemble des pièces du dossier, d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet de construction ; » (Conseil d’État, 1ère – 6ème chambres réunies, 13/04/2016, n°389798)

Si vous êtes une association, il faut que les statuts de celle-ci aient été déposés en préfecture au moins 1 an avant l’affichage en mairie de la demande du bénéficiaire du permis. Vous devrez alors être en mesure de produire vos statuts (articles L.600-1-1 et L.600-1-2 ; R.600-4 du code de l’urbanisme). 

Vous pouvez contester un permis de construire pendant deux mois à compter du premier jour d’affichage continu du panneau prévu à l’article R.424-15 du code de l’urbanisme sur le terrain (article R.600-2 du code de l’urbanisme).

Il s’agit du fameux panneau d’affichage que l’on retrouve dans les magasins de bricolage. Il doit mesurer plus de 80 centimètres puisque son contenu doit être lisible, à l’œil nu, depuis la voie publique.

Un certain nombre d’informations doivent obligatoirement figurer sur ce panneau outre évidemment son objet : le nom de l’architecte, la hauteur, la surface de plancher de la construction, l’adresse où le dossier peut être consulté…

Il doit aussi contenir une mention sur les voies et délais de recours des tiers, et une mention sur l’obligation de notification à laquelle on reviendra.

Si les mentions obligatoires ne figurent pas, ou si le panneau est illisible, ou posé à un endroit éloigné qui ne permet pas au tiers de lire les informations qu’il contient (par exemple au deuxième étage d’un immeuble ; derrière un local poubelles ; au fond d’une impasse…) alors les délais de recours ne commencent jamais à courir. C’est évidemment la même chose si le panneau… n’a tout simplement jamais été affiché. 

Concrètement dans ce cas, vous pouvez contester le permis dans un délai limité par deux événements : soit l’achèvement de la construction, soit à défaut d’achèvement, un délai raisonnable après délivrance de l’autorisation.

En matière d’autorisations d’urbanisme, les tiers qui souhaitent contester la régularité d’un permis de construire et en demander le retrait ou l’annulation disposent de plusieurs voies, qui s’articulent entre elles selon l’objectif visé. 

Tout d’abord, il est parfaitement possible de faire connaître vos objections à l’autorité compétente pour délivrer le permis – souvent, il s’agira du maire – afin de demander le retrait de cette autorisation que vous jugez illégale.

Le recours gracieux présente à la fois des avantages et des inconvénients.

🧨 L’inconvénient, c’est de prendre le risque de n’obtenir aucune réaction à votre demande. Tous les services d’urbanisme n’ont pas les mêmes capacités à traiter les demandes de retrait ; certains doivent s’appuyer sur les services de l’Etat, d’autres ont bien le personnel nécessaire mais auront reçu des directives internes tendant à ne jamais répondre expressément aux demandes de retrait de sorte à éviter de fournir au demandeur des arguments qu’il pourra contester au contentieux. D’autres encore, seront tout simplement en désaccord avec votre demande et répondront dans leurs meilleurs délais ; vous aurez alors « perdu le temps » que vous aurez consacré à cette demande faite en amont.

✨ L’avantage, c’est d’ouvrir les voies d’une discussion avec les services d’urbanisme ; en leur donnant des éléments précis, sérieux, bien argumentés, pour expliquer en quoi l’autorisation est illégale et doit être retirée, l’administration peut parfaitement se ranger de votre côté. Elle peut alors tenir compte de vos demandes et retirer l’autorisation litigieuse. Elle peut aussi être à l’origine d’une demande de modification du permis obtenu par le pétitionnaire (le « pétitionnaire » est le demandeur de l’autorisation d’urbanisme). Le pétitionnaire déposera alors un permis de construire modificatif. C’est aussi l’occasion d’ouvrir une discussion avec le bénéficiaire du permis de construire.

Il existe un autre avantage au recours gracieux : il fait gagner du temps. En effet, il peut arriver que l’on ne découvre un affichage de permis qu’un peu tardivement, et qu’on n’ait pas le temps de consulter le dossier conservé en mairie. Dans ce cas, le recours gracieux fait gagner environ quatre mois, selon les cas (il peut faire gagner un peu moins de temps en cas de rejet explicite).

Lorsqu’un recours gracieux n’aboutit pas, c’est-à-dire lorsque la démarche n’a pas permis une modification du projet ou un retrait du permis en fonction de l’objectif visé, il est alors possible d’envisager un recours contentieux devant le Tribunal administratif du ressort du projet.

Ce recours contentieux devant le juge administratif est parfaitement possible sans recours gracieux préalable.

La stratégie (recours gracieux puis recours contentieux seulement en cas d’échec, ou contentieux immédiat) dépend très largement de la situation particulière que vous rencontrez. 

Devant le juge, on demande l’annulation de l’autorisation d’urbanisme.

Attention toutefois, il faut bien comprendre que le contentieux de l’urbanisme n’est pas fait pour protéger votre droit de propriété, mais pour protéger la bonne mise en œuvre du projet territorial d’urbanisme. Par conséquent, si une autorisation de construire est susceptible d’être régularisée, elle le sera sans doute – y compris pendant l’instance.  

Dit autrement : si je veux attaquer le permis de construire une maison individuelle de mon voisin, car je sais qu’il ne respecte pas les règles de hauteur applicables sur notre commune et que sa construction bloque ma vue, je dois être conscient que ce dernier pourrait déposer un permis de construire modificatif qui régularise sa construction. Celle-ci verra le jour, éventuellement avec 10 centimètres en moins (si c’était la règle méconnue). J’y perds les frais d’instance (et de votre avocate), j’y gagne un conflit de voisinage « dur » : est-ce que le jeu en vaut la chandelle ? Parfois, il vaudra mieux analyser en amont le bilan coût/avantages et se garder d’attaquer des projets à tout va.

A chaque étape (gracieuse ou contentieuse), il est nécessaire de respecter des formalités de notification.

Faute d’avoir notifié correctement votre recours, il sera irrecevable devant le Tribunal administratif. Autant dire qu’un recours gracieux mal notifié n’a aucune chance d’ouvrir une discussion sérieuse puisque, concrètement, vous n’aurez pas accès au juge – et vous n’aurez donc aucune crédibilité dans la discussion.

Le code de l’urbanisme (article R.600-1) encadre ces formalités et la jurisprudence est venue apporter de nombreuses petites précisions au cas par cas. Retenez en bref qu’il faut veiller à :

✅ notifier à tous les bénéficiaires de l’autorisation, en ne se trompant pas à la lecture du formulaire CERFA de demande de permis (si possible en recoupant avec l’information donnée sur le panneau d’affichage),

✅ dans les 15 jours de l’introduction du recours,

✅ par LRAR,

✅ avec la totalité du recours en pièce jointe,

✅ conserver vos preuves de dépôt et de réception.

Attaquer une autorisation d’urbanisme est un exercice délicat, qui nécessite d’avoir vérifié au préalable :

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