Attention, si vous êtes propriétaire ou locataire d’un bien d’habitation, vous n’êtes pas toujours libre d’y exercer une activité professionnelle.
Dans les villes de plus de 200 000 habitants, et dans les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, le changement d’usage des locaux est encadré par le code de la construction et de l’habitation.
L’objectif de cette réglementation est de protéger les logements dans les zones qui n’en présentent pas assez au regard de la densité de population.
Ainsi, les articles L.631-7 et suivants du code de la construction et de l’habitation établissent un principe de contrôle préalable du changement d’usage des locaux d’habitation. Il ne faut pas négliger cette démarche préalable à votre projet – qu’il y ait des travaux ou non.
Des règlements municipaux peuvent préciser le régime procédural, il faut donc se renseigner sur l’existence de telles dispositions locales.
L’autorisation de changement d’usage peut être délivrée :
- A titre personnel : elle ne vous est accordée qu’à vous, et cesse de produire des effets lorsque votre activité cesse ;
- A caractère réel : elle est attachée aux locaux et non à la personne. Ce régime s’inscrit dans la durée mais nécessite de « compenser » en achetant les droits de transformer le bien, par un mécanisme de compensation qui peut être coûteux.
Il est parfois difficile de trouver un local adapté à votre exercice professionnel. Pour les indépendants notamment, tels les médecins et autres professionnels de santé, avocats, commissaires de justice, experts-comptables, architectes…, il peut être ardu de démarrer son activité, et la question pourra se poser d’une ’installation dans un logement à défaut de disponibilité d’un immobilier d’entreprise, ou si ce dernier est inaccessible à votre portefeuille, ce qui arrive fréquemment dans les grands centres urbains.
Les règlements municipaux peuvent par exemple prévoir :
- Des cartes délimitant des secteurs où l’autorisation personnelle pourra être délivrée sans limite de surface des locaux, ou avec limite de surface (exemple : vous pouvez demander l’autorisation pour un maximum de 250 m² par professionnel en exercice),
- Ou prévoir que l’autorisation personnelle sera délivrée à chaque fois qu’il s’agit de remplacer un professionnel installé,
- Ou encore, prévoir une distinction entre les professionnels libéraux réglementés et non réglementés, ou les activités artisanales et commerciales, ou encore donner un cadre facilitant pour les associations et fondations.
Dans le cas où la transformation se veut définitive, il sera plus contraignant d’obtenir l’autorisation de changement d’usage. L’autorisation va revêtir un caractère « réel » c’est-à-dire attaché au local et non à votre personne à raison de votre exercice professionnel. Dans ce cas, les règlements municipaux prévoient en général un mécanisme de compensation.
A titre d’exemple à Paris, il existe un secteur de compensation renforcée au sein duquel vous devez trouver 2m² à compenser pour 1m² transformé, et dans certains arrondissements, il est même nécessaire de trouver cette compensation au sein de l’arrondissement de votre projet. En dehors de ce secteur, il est seulement nécessaire de trouver en compensation des locaux d’une surface au moins égale à celle que l’on veut transformer.
Concrètement, il s’agit d’acheter de la commercialité auprès d’un porteur de projet ou vendeur de commercialité.
Vous devez vérifier que le règlement de copropriété vous autorise à implanter l’activité voulue dans l’immeuble. A défaut, vous devez en effet obtenir l’autorisation de la copropriété.
Oui, vous devez demander à votre propriétaire son accord écrit pour la transformation de vos locaux. A défaut, il pourra considérer que vous ne respectez pas le contrat de bail, et vous demander la remise en état antérieur des locaux.
Cela dépend. En toute hypothèse, votre changement d’usage aura vraisemblablement pour effet de modifier la destination du bien, or le changement de destination d’un local nécessite en général une déclaration préalable et parfois, une demande de permis de construire.
Autre point de vigilance : la règlementation du changement d’usage couvre aussi les cas où vous mettez votre bien en location saisonnière type AirBNB, booking ou autre plateforme.
En effet, la location d’un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile est un cas de changement d’usage (article L.631-7, dernier alinéa). Dans ce cas, la commune a pu fixer un régime particulier de changement d’usage temporaire. Les règles diffèrent selon qu’il s’agit de votre résidence principale ou secondaire.
Pour donner un exemple, à Paris, il existe un règlement municipal qui fixe les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage de locaux d’habitation et qui détermine les mécanismes de compensation. Approuvé en 2008, il a fait l’objet d’une modification à l’occasion du Conseil de Paris du 15 décembre 2021 par la délibération n°2021 DLH 459. Le règlement est consultable sur ce lien et la ville de Paris met à disposition une page très bien construite.
A Paris, si vous souhaitez louer votre logement à un professionnel libéral, ce dernier devra préalablement demander une autorisation de changement d’usage à caractère personnel, c’est-à-dire attaché à la personne. Il faudra veiller à ce que son activité relève d’une profession réglementée (entrant dans le champ d’application de la loi du 29 novembre 1966 sur les Sociétés civiles professionnelles ou de la loi du 31 décembre 1990 sur les Sociétés d’exercice libéral, recodifiées par l’ordonnance du 8 février 2023), et :
- Dans la limite d’un seul local par professionnel,
- Pour un maximum de 50 m² par professionnel et maximum 150 m² s’ils sont plusieurs (sauf dans certains quartiers plus restrictifs),
- Avec des règles plus souples en cas de remplacement d’un professionnel libéral. Dans ce cas, l’autorisation peut être délivrée jusqu’à 250 m².
Les rez-de-chaussée parisiens bénéficient de règles favorables, entre autres :
- En RDC, il n’y a pas de limite de m² pour obtenir une autorisation de changement d’usage pour les professions libérales,
- L’autorisation peut être délivrée pour une activité artisanale lorsque le local est situé sur une voie comportant une protection particulière de l’artisanat (cf PLU de Paris).
Si vous résidez dans le logement, vous pouvez obtenir une autorisation d’y exercer votre activité professionnelle, u compris commerciale, pour la moitié au maximum des surfaces de votre logement (autorisation « mixte »). Dans certains cas, il est même possible de se dispenser de toute autorisation.
Si vous n’entrez pas dans les cas d’autorisation personnelle, l’autorisation de changement d’usage est soumise à compensation.
Pour rappel, tout mètre carré de surface de plancher de logement supprimé, doit être « racheté » par un nombre équivalent de mètre carré de surface de plancher converti ailleurs en logement. Dans le secteur de compensation renforcée, c’est même 2m² pour 1m² transformé (sauf si la compensation porte sur du logement social). Cela peut même être 3 m² pour 1m² transformé si vous envisagez d’y faire du meublé de tourisme, dans certains secteurs.
Si vous pensiez pouvoir légitimement exploiter votre activité libérale, commerciale ou votre meublé de tourisme sans demander d’autorisation, il est possible que la commune vous signale que vous êtes en infraction aux dispositions de l’article L.631-7 du code de la construction et de l’habitation et aux règlements locaux le cas échéant. En effet, l’article L. 651-2 du Code de la construction et de l’habitation prévoit cette infraction et l’amende encourue : « Toute personne qui enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 € par local irrégulièrement transformé (…) ».
Le portail des entreprises du Ministère de l’économie et des finances vous propose des fiches et une FAQ pour bien comprendre cette règlementation, disponibles sur ce lien.
Dans ce cas, vous pourrez en général régulariser votre situation, le plus souvent avec l’aide des services en charge de l’urbanisme dans votre commune. Lorsqu’une telle démarche n’a pas été possible, la ville dressera en principe un procès-verbal d’infraction et vous devriez recevoir une assignation à comparaître devant le Tribunal Judiciaire. Il convient de constituer avocat dans les quinze jours pour assurer votre défense.
Si votre affaire arrive jusqu’au juge, de nombreuses stratégies contentieuses sont possibles, en fonction de l’analyse de votre situation. Parfois, il sera possible de contester purement et simplement l’infraction ; en tout état de cause, il est possible de demander une diminution de l’amende et d’obtenir un calendrier de paiement de celle-ci.
- Analyse de la faisabilité de votre projet
- Accompagnement au dépôt de vos demandes d’autorisation de changement d’usage
- Représentation en justice